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Progressisme Vs conservatisme, le piège des mots

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« Le camp du progrès contre celui de la réaction » : les hommes politiques de gauche –et de droite– se positionnent volontiers dans cette grille de lecture. Le progressisme serait le Bien absolu face au Mal, incarné par le conservatisme, le nationalisme et le populisme. Ne pas tomber dans ce piège sémantique suppose de bien comprendre le sens de ces mots. Décryptage.
Utiliser à tort et à travers des mots qui ont un sens élaboré et affiné depuis longtemps, par différents auteurs, des mots complexes, d’une grande portée politique et philosophique, comme si leur sens était « évident », c’est entrer de plain-pied dans la démagogie. 
Emmanuel Macron et Benjamin Griveaux ne se sont pas privés de ce type d’exercice en fustigeant à l’envi le « nationalisme » ou le « populisme » et en se drapant volontiers dans le « progressisme ». 
Or, si notre société est malade d’un point de vue social, culturel et identitaire, pratiquer la démagogie et déformer certains mots font partie des causes et des symptômes du mal. « Mal nommer un objet, c’est ajouter au malheur de ce monde », soulignait Albert Camus. 
Heureusement, une cure de vérité peut nous aider à guérir. Ce n’est pas le seul moyen bien sûr, mais comme disait Lacan, la médecine a fait mouche avec des mots, ce qui ne remet pas en cause les effets des traitements chimiques ou mécaniques. Mais bien nommer les choses est un premier pas.
Le nationalisme qu’évoque Benjamin Griveaux est à la base un principe politique qui légitime pour un peuple le droit de fonder une nation (comme le sionisme, par exemple). Il est aussi l’exaltation du « sentiment national », il a comme synonyme le patriotisme. Lorsque de Gaulle disait que le patriotisme, c’était aimer son pays et que le nationalisme c’était détester celui des autres, il s’agissait d’une rhétorique adaptée à l’époque où des courants idéologiques avaient instrumentalisé le nationalisme pour arriver à leurs fins (communisme, fascisme…).
En s’opposant aux nationalistes, Emmanuel Macron occulte le fait que les peuples votant pour des partis populistes (populisme = pensée qui stipule que la raison est du côté du peuple), revendiquent une souveraineté qu’ils estiment mise en danger par l’Europe.
Le progressisme est la volonté d’instaurer ou d’imposer des réformes considérées comme autant de progrès sociaux. La pensée progressiste est un préjugé sur le temps. Le présent peut être considéré comme meilleur que le passé, jugé « obscur », mais elle peut aussi mal considérer le présent, jugé forcément moins bon que l’avenir.
Le progressisme est surtout né des forces qui désiraient renverser l’ancien régime. Il a ensuite été repris par les communistes et aujourd’hui par le socialisme ou les partis anglo-saxons dits « social liberal » (le mot « liberal » en anglais correspond plus à notre gauche sociétale qu’au libéralisme « de droite » ou libéralisme-conservateur).
Le progressisme détourna le noble de Progrès de son idée de base –émanciper les hommes de leurs asservissements spirituels, sociaux, etc.– pour en faire une arme contre son ennemi, à savoir le système de l’époque. Ainsi, Staline considérait-il ce qui était avant le communisme comme archaïque ou réactionnaire et cette vision n’est pas l’apanage du dictateur communiste. 
Le progressisme est donc d’abord une arme et à ce titre, il s’embarrasse peu de réflexions sur les conséquences morales, humaines et sociales de l’instauration de telle ou telle réforme. L’idée nouvelle est jugée meilleure du moment que, justement, elle est nouvelle et qu’elle s’oppose à un système considéré comme un ennemi qu’il faut détruire. Sans remonter au communisme, adepte de ce mode de pensée, certaines réformes plus actuelles instaurées ou en voie de l’être (mariage pour tous, PMA sans père, GPA…) sont typiques de cet argumentaire progressiste.
Mieux, elles brandissent inévitablement l’étendard de « l’égalité », une égalité abstraite et hors-sol qui constitue l’Alpha et l’Omega de l’argumentaire progressiste. Comme si l’égalité était un but en soi et comme si apporter l’égalité dans n’importe quel domaine social était forcément un « bien ». Nous tombons dans l’égalitarisme, quand le but est de promouvoir l’égalité pour l’égalité, comme si toute égalité était nécessairement un bienfait.
Le progressisme est construit de sorte que les idées nouvelles soient instaurées de force, qu’il s’agisse de force physique (révolution) ou par une clé de bras à la démocratie (majorité parlementaire non représentative du peuple, en s’opposant aux citoyens, par décrets…). Il implique quasiment toujours une violence. Justin Trudeau, élu progressiste par excellence au Canada, nous l’a démontré encore lorsqu’il s’en est pris à une journaliste qui lui posait une question sur l’immigration illégale (1), ce qui remettait en cause sa politique et son idéologie.
Il est d’ailleurs intéressant de relever que le système de pensée de Trudeau est cohérent avec la philosophie de son père, un ancien proche de Fidel Castro. S’il n’y a pas toujours de lien entre les idées et le parcours personnel de chacun, l’attitude de Justin Trudeau et sa politique générale attestent bien de cette filiation idéologique familiale.
Au contraire, le conservatisme est plus en accord avec la démocratie. Le conservatisme n’est pas une doctrine, mais une philosophie politique où tout changement est limité et pondéré. Le conservatisme réfléchit aux conséquences d’une idée nouvelle avant de la considérer comme un progrès en soi. Le conservatisme n’est pas opposé au changement (sinon, c’est de l’immobilisme), mais les conservateurs tiennent à respecter les structures sociales, les traditions et l’histoire.
Le progressisme induit une idée de rupture, alors que le conservatisme recherche la continuité. La pondération face à tout changement implique la discussion, la concertation, ce qui oblige presque le conservatisme à ne fonctionner que de manière démocratique. Il est aussi le seul qui peut garantir la préservation des bases identitaires de la société.
Le conservatisme est semblable à l’homme qui mûrit, évolue en restant le même, sinon il ne se reconnaîtrait pas et ça ne serait pas qu’un sentiment, il se vivrait autre, plus radicalement encore que s’il était amnésique. Le progressisme est plutôt comparable à un lavage de cerveau, où l’on fait table rase du passé, de l’histoire, comme s’ils n’avaient jamais existé et qu’ils étaient objet de haine et de mépris. 
C’est l’une des oppositions les plus marquantes entre ces deux courants de pensée : le progressisme se construit sur la haine de l’histoire, le conservatisme sur son amour et la peur de la perdre, comme on craint de perdre un être aimé.
Il n’y a donc aucune « crainte » à avoir que Les Républicains évoluent dans un sens conservateur et « nationaliste » comme le regrettait Dominique Bussereau en janvier dernier. Il reproche à la droite de reprendre certains propos du RN, jugeant cela inadmissible simplement du fait que ce sont des responsables de ce parti qui les ont prononcés. Une sorte de Jacques-a-dit inversé, en somme : si le RN dit quelque chose, même quelque chose de logique, il ne faut pas le répéter… drôle d’enfantillage venant d’un septuagénaire avec un tel pedigree politique !
Ce faisant, il ne pose aucune réflexion, il ne se demande pas si l’évolution de la droite dont il s’inquiète ne serait pas légitime, voire tardive, si elle ne renouerait tout simplement pas avec le gaullisme, qui était à la fois novateur et conservateur. Il ne cherche pas à savoir si une telle évolution ne serait pas en cohérence avec l’avis des Français, qui votent toujours davantage pour le RN.
Dominique Bussereau préfère vivre dans le « Nouveau Monde », sans jamais se demander si une partie de la droite n’est pas justement en train de chercher à s’y adapter, restant pour ainsi dire coincé dans un progressisme éculé. Il est bien le symbole de ces progressistes arrogants, qui sont en fait les premiers des réactionnaires.
Mickael Coillot

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