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Un homme savoure un instant précieux sans prêter attention au photographe qui le lui vole. Cette photo tombera longtemps dans l’oubli, avant qu’on la ressorte d’un vieux tiroir…
Philippe contemplait la vacuité du néant qui l’entourait. La quiétude envahissait son esprit bercé par les flots langoureux d’une mer vigoureuse.
– Sourire !
Le vacancier fixait l’horizon sans prêter attention à l’appareil qui avalait frénétiquement des moments volés.
La photo était plutôt réussie. Elle eut son moment de gloire au cours l’été indien qui suivit, à l’heure de l’apéritif, fit un retour en grâce à l’occasion de son premier anniversaire, puis sombra dans l’anonymat d’un tiroir que l’on n’ouvrait guère plus. Cet instant banal, césure insignifiante d’un bel après-midi d’été, ce moment oublié, ce sourire figé sur du papier glacé deviendrait pourtant, par le truchement du destin, la seule relique d’une vie terrestre, d’un être aimé.
Philippe n’était plus. Son reflet funeste trônait dans un cadre au milieu du salon. Et l’insignifiance exultait de sa revanche éternelle.
