Cet article a été lu par 651 personnes
Par Bruno Guillard
On entend fréquemment parler d’Antonio Gramsci depuis quelques temps. Ainsi, Marion Maréchal inscrit la création de son école dans le cadre d’une action culturelle d’inspiration gramscienne et Jérôme Sainte-Marie a fait une analyse gramscienne de la situation politique française dans son dernier ouvrage intitulé ‘’Bloc contre bloc’’. Il y a cinquante ans, la Nouvelle Droite s’était déjà inspirée de Gramsci et avait entrepris une action « métapolitique » (ce mot ne fait pas partie du vocabulaire gramscien) qui n’a eu aucune retombée politique.(1) Alors, la pensée de Gramsci peut-elle aider les « nationaux-populistes » à élaborer une stratégie de conquête du pouvoir au XXIe siècle ?
Biogaphie d’Antonio Gramsci
‘’Antonio Gramsci est né le 22 janvier 1891 dans la province de Cagliari, en Sardaigne. Son père, de lointaine origine albanaise, est fonctionnaire de l’administration locale, mais il est suspendu de ses fonctions et emprisonné en 1897 pour abus de pouvoir. Les sept enfants de la famille Gramsci, dont Antonio est le quatrième, connaîtront dès lors la privation, qui pèsera sur la santé du futur auteur des Cahiers de prison, déjà fragile.
Gramsci entre pour la première fois en contact avec les idées socialistes au lycée de Cagliari, notamment sous l’influence de son frère Gennaro. Il achève son lycée en 1911 et obtient une bourse qui lui permet d’étudier à Turin, où il s’inscrit en faculté de lettres, en philologie, une discipline à laquelle il songea un temps à se consacrer, et dont il restera des traces dans sa manière d’aborder les problèmes théoriques et politiques.
C’est à Turin qu’il rencontre Palmiro Togliatti, Angelo Tasca et Umberto Terraccini, avec qui il militera d’abord au parti socialiste italien (PSI) puis au parti communiste italien (PCI), et avec qui il fondera en 1919 le journal L’Ordine Nuovo.
Délaissant ses études, Gramsci se consacre de plus en plus au journalisme, à la fois politique et culturel. Au moment de la fondation du PCI en 1921, il devient membre de son comité central. Le parti est dominé à ses débuts par la figure d’Amadeo Bordiga, l’une des cibles de Lénine dans Le Gauchisme, maladie infantile du communisme (1920). Gramsci en devient secrétaire général en 1924.
En 1922 et 1923, Gramsci passe deux ans à Moscou comme délégué du PCI à la IIIe Internationale. Il est élu député à l’Assemblée nationale italienne, représentant de la Vénétie, en avril 1924. Cette même année, il épouse Julia Schucht, rencontrée à Moscou, avec qui il aura deux fils, Delio et Giuliano. Gramsci sera également très proche de sa belle-sœur, Tania Schucht, à qui est envoyée une partie importante de ses lettres de prison.
Gramsci est arrêté le 8 novembre 1926 à Rome, et condamné en 1928 à vingt ans de prison. Il meurt le 27 avril 1937 d’une hémorragie cérébrale, après dix ans de calvaire dans les prisons fascistes, et en ayant produit entretemps l’une des œuvres politiques les plus importantes du XXe siècle’’ (Razmig Keucheyan : ‘’Guerre de mouvement et guerre de position’’ ; pages 335 et 336).
Les Cahiers de prison
Mis en prison par le régime mussolinien, Gramsci mène alors une réflexion pénétrante sur la politique et la culture (2) qui va se traduire par la rédaction de ses fameux Cahiers (33 cahiers ; 2248 pages) rédigés dans des conditions très pénibles et en devant déjouer la censure carcérale, ce qui les rend un peu difficiles d’accès. Deux livres publiés il y a quelques années, celui de Razmig Keucheyan (‘’Guerre de mouvement et guerre de position’’) et celui de George Hoare et Nathan Sperber (‘’Introduction à Antonio Gramsci’’) permettent de saisir la subtilité intellectuelle du théoricien communiste.
Gramsci, bien que marxiste, n’était pas un marxiste rigoureusement orthodoxe. Par exemple, il ne partageait pas ce qu’il appelait l’économisme ou déterminisme économique, emblématique du marxisme vulgaire. Contrairement à la plupart des marxistes, il ne pensait pas que l’économie, la structure économique ou les rapports de production déterminaient seuls la nature et l’évolution des sociétés humaines (3).
Il était par ailleurs un admirateur de Machiavel qui n’était, à son avis ni cynique ni « machiavélique » et qui avait à ses yeux l’immense mérite d’avoir compris que la politique était tout à la fois une science autonome et un art autonome (4).
Il accordait une grande importance à la culture (la superstructure) dont il pensait qu’elle n’était pas un simple reflet de l’infrastructure économique de la société ; il pensait au contraire que l’une et l’autre s’interpénétraient et se nourrissaient mutuellement. En révolutionnaire communiste désireux de faire triompher le PCI, il cherchait à comprendre comment les idées circulaient et imprégnaient la société, afin de définir une stratégie de conquête du pouvoir. Pour autant, il n’adhéra jamais à un pur « culturalisme » qui se limiterait à la diffusion, même massive, d’idées (5). Le travail culturel était, selon lui, nécessairement lié à celui d’un parti politique visant à rassembler de larges couches sociales (en l’occurrence, le prolétariat ouvrier de l’industrie et les petits agriculteurs). Gramsci n’était pas partisan d’une stricte conception « classiste » ; le mouvement communiste pouvait, à son avis, entraîner avec lui beaucoup plus que le seul prolétariat (6).
Le rôle de ceux qu’il appelle « intellectuels organiques » consiste à diffuser une « vision du monde, une conception du monde », à produire une nouvelle culture, à créer une atmosphère culturelle nouvelle, à faire émerger, au sein de couches sociales suffisamment vastes, une « volonté collective » susceptible de provoquer, à terme, un renversement de l’hégémonie exercée par le groupe dominant (en l’occurrence la bourgeoisie libérale et conservatrice) puis son remplacement par une nouvelle hégémonie (communiste celle-là) (7). Ce travail de diffusion est réalisé par les « intellectuels » au sein de ce qu’il appelle la « société civile (8)(9). L’intellectuel organique est un militant qui participe à l’organisation et à l’encadrement du parti communiste, ce n’est pas un intellectuel qui observe les Terriens depuis Sirius ! (10) Il n’est pas nécessairement un intellectuel de très haut niveau culturel ayant une formation lui permettant d’analyser de manière pénétrante les événements mais il appartient à une élite politique (11) qui répand des idées en vue de créer une homogénéité au sein de l’ensemble constitué par les groupes sociaux susceptibles de prendre le pouvoir (12). Ainsi, au cours du 18e siècle, les philosophes des Lumières, mais aussi les animateurs de clubs littéraires ou les cabaretiers de villages, ont créé et diffusé les idées nouvelles dans une part substantielle du peuple français (13) ; ces actions diverses et complémentaires sont à l’origine de la révolution de 1789.
Une stratégie gramscienne pour les populistes du XXIe siècle ?
Pour qu’une action métapolitique puisse aboutir il faut qu’une part substantielle du peuple, libérée de toutes attaches politiques et culturelles avec la classe politique au pouvoir, c’est-à-dire ayant échappé à l’hégémonie qu’exerçait cette dernière, soit sensible aux idées des promoteurs de cette action.
Le paysage politique a beaucoup changé au cours de ces dernières années. Les Français qui acceptaient, de plus en plus mal il est vrai, l’hégémonie des partis dits de gouvernement et celle de l’idéologie libérale-libertaire que ces derniers véhiculent, ont compris que ces partis, de gauche et de droite, avaient provoqué l’accroissement des disparités en matière de richesses, l’appauvrissement des plus fragiles puis celui des classes moyennes inférieures (désormais, ce sont même toutes les classes moyennes qui craignent pour leur avenir), la relégation d’une grande partie des Français (60% environ selon Guilluy) dans des zones en voie de désertification économique et culturelle (la France périphérique), la concentration des richesses dans 20 métropoles, la désindustrialisation massive de notre pays, le démantèlement en cours de l’Etat protecteur, l’ouverture des frontières à tous les flux, l’installation de populations africaines qui refusent désormais l’assimilation, la présence de plus en plus massive de la religion musulmane, l’insécurité physique et culturelle, le terrorisme d’origine islamique, la formation de centaines de zones de non droit….. La France périphérique, qui a compris aussi que le système représentatif est tout sauf démocratique, n’attend plus rien de la classe politique. Elle est désormais ouverte à autre chose ; le soutien accordé par une très large majorité de nos compatriotes au mouvement des Gilets Jaunes en témoigne. Mais elle n’est pas ouverte à n’importe quoi, elle sait ce qu’elle veut bien qu’elle n’ait pas encore trouvé ses leaders (Le Rassemblement National et DLF rassemblent désormais près de la moitié de cette France périphérique ; est-ce qu’ils vont devenir le noyau autour duquel va se cristalliser le bloc populaire en formation, comme l’annonce Jérôme Sainte-Marie ? C’est possible mais ce n’est pas encore certain). Les aspirations principales des habitants de cette France périphérique sont les suivantes : maintien d’un Etat protecteur des plus faibles, diminution de l’écart grandissant entre les plus riches (le 1%) et le reste de la population, revitalisation économique, sociale et culturelle de la France périphérique, démocratie référendaire (référendum d’initiative populaire), arrêt de l’immigration et renvoi de tous les étrangers en situation irrégulière ou sans emploi, rapatriement des éléments essentiels de souveraineté abandonnés à l’Union Européenne, mise en place d’une politique permettant d’assurer la sécurité des citoyens et de leurs biens, protectionnisme économique quand il est nécessaire, préservation de notre environnement naturel. Le sentiment national fait son retour dans la France périphérique (le drapeau national a été l’étendard de la révolte des Gilets Jaunes avant que celle-ci, brisée dans son élan par une répression musclée, ne se réduise à quelques milliers de manifestants encadrés par l’extrême-gauche) et avec lui le rejet de la politique d’immigration d’une part, celui de l’évolution de l’UE vers le fédéralisme, d’autre part. La France périphérique est en train de mettre un terme à ses habitudes électorales lesquelles faisaient les choux gras du PS et de LR ; une moitié de cette France délaissée (30% sur 60%) a fait le choix du RN ou celui de DLF et l’autre moitié s’abstient ou vote contre le parti au pouvoir en attendant de voir poindre une offre alternative. Notre pays est en situation de « crise organique », laquelle peut durer plus longtemps qu’on ne le souhaite (voir infra).
La France périphérique est assez diverse d’un point de vue sociologique mais elle est homogène à certains égards. Elle est constituée de couches sociales qui sont les perdantes de la mondialisation économique libérale et qui en ont de plus en plus nettement conscience. Elles ont également conscience de s’appauvrir et elles craignent pour leur avenir et pour celui de leurs enfants. Le mouvement des Gilets Jaunes illustre parfaitement la nature de cette majorité française (60%) qui est constituée à la fois de chômeurs, de travailleurs pauvres, de travailleurs en voie d’appauvrissement, de retraités à faibles revenus mais aussi de travailleurs indépendants et de petits patrons qui travaillent énormément pour ne pas gagner beaucoup.
De nombreuses conditions, qui permettraient un changement de paradigme politique, sont aujourd’hui remplies, mais, la majorité (la France périphérique) n’a pas encore fait sienne l’idée selon laquelle elle pourrait imposer une transformation de notre société. Pour l’instant, un nouveau « sens commun » n’a pas encore remplacé l’ancien ; c’est à cela que doit œuvrer une « élite politique » d’ « intellectuels organiques » nationaux-populistes. Ce travail peut être mené par des partis politiques mais il peut l’être aussi par des groupes satellites qui ne participent pas aux activités électorales (Sur ce point, Gramsci ne dit rien ; pour lui le combat était mené par le PCI . Mais, ses héritiers ont su, après la deuxième guerre mondiale, créer d’innombrables courroies de transmission du PCI au sein de la « société civile » : journaux, centres culturels, associations……)(14).
La « crise organique » que nous traversons a créé, pour la première fois depuis 1945, une situation qui peut conduire à la formation d’un nouveau « bloc historique » parce que l’évolution économique, sociale et démographique de notre société crée une angoisse majoritaire (ce qui n’était pas du tout le cas en 1968 ; nous étions alors dans les « trente glorieuses », il n’y avait que 100000 chômeurs et nous voyions alors la vie en rose). Pour qu’un nouveau « bloc historique » puisse se former et remplacer le bloc libéral-bourgeois qui détient le pouvoir, il faut qu’un corpus d’idées cohérentes, recevables par les 60% de Français de la France périphérique, soit diffusé et intériorisé par ces derniers (les partis « populistes » ont diffusé certaines idées mais ils n’ont pas terminé le travail, loin s’en faut ! ).
Mais, pour que se forme un nouveau « bloc historique » durable, il faudra que l’infrastructure et la superstructure s’interpénètrent totalement, c’est-à-dire qu’il faudra que le socle économique de notre société soit cohérent avec la nouvelle vue du monde dominante, ce qui impliquera une transformation du système économique. Pour cela, il faudra, après la conquête du pouvoir politique, mettre fin à la financiarisation de l’économie et restaurer un système financier sain ayant pour seul but de financer les activités de production, en finir avec les délocalisations, l’utilisation des paradis fiscaux, la mise en concurrence des travailleurs nationaux par les immigrés, le libre-échangisme, la concentration sans fin des richesses….. A défaut, leur succès ne sera que provisoire.
Dans la France de 2020, seule la « France périphérique » est en mesure de provoquer le renversement du pouvoir de la bourgeoisie mondialiste et mondialisée, dont le leader actuel est Macron, parce qu’elle est nettement majoritaire, parce qu’elle est dans une situation économique de plus en plus difficile et parce qu’elle rejette de plus en plus nettement, dans tous les domaines, les idées de la dite bourgeoisie. C’est elle qui porte le patriotisme français, rejette l’immigration et rêve d’une renaissance de la nation. Envisager, comme le font certains, une conquête « gramscienne » du pouvoir en s’appuyant essentiellement sur ce qui reste de la bourgeoisie traditionnelle « libérale-conservatrice », laquelle est âgée, très minoritaire et rivée à ses intérêts qu’elle n’entend pas partager avec la France d’en bas, est voué à un échec certain.
Notes
(1) Les tentatives de pénétration et d’influence au sein des partis politiques de droite (RPR, PR, FN) faites par certains membres de la ND, au cours des années 1970, 1980 et 1990 ont toutes échouées. Les idées de la ND étaient beaucoup trop éloignées de celles qui prévalaient dans ces partis. Les conditions nécessaires à la création d’un parti politique inspiré par les idées de la ND n’ont jamais été remplies et l’européisme ultra-régionaliste (l’Europe aux cent drapeaux) de cette dernière lui interdit toute émergence politique dans le contexte actuel. Ceci illustre le fait qu’il ne suffit pas d’émettre des idées, encore faut-il qu’elles soient en phase avec les préférences et les aspirations d’une part substantielle du peuple lequel n’est pas un simple contenant dans lequel il suffirait de déverser des idées ; il a ses propres idées et ne s’en laisse pas facilement conter. De plus, les humains partagent des émotions, des sentiments et un « sens commun » qui sont encore beaucoup plus difficilement déracinables que les idées.
(2) ‘’ Dans les écrits carcéraux de Gramsci, ce souci constant du rapport culture-politique est axé sur une problématique de l’organisation de la culture. En particulier, l’auteur va se poser les questions suivantes : quel est le réseau d’institutions qui étaie la vie culturelle à l’échelle d’une société ? Quel type de relation éducative peut faire œuvre de transmission dans le domaine de la culture ? Et surtout, quel est le rôle politique des intellectuels ?’’ (Introduction à Antonio Gramsci, page 25).
(3) ‘’Mais, simultanément, il refuse de suivre la thèse inverse issue du marxisme matérialiste « vulgaire » de ses contemporains qui, se réclamant de Karl Marx pour le caricaturer, posent que la vie culturelle n’est qu’un reflet mécanique des forces économiques……..Par intellectuel organique, Gramsci entend un type social d’intellectuel créé aux côtés d’une classe émergente de la société (la bourgeoisie d’abord, le prolétariat ensuite) et appelé à jouer un rôle organisateur dans l’avènement du nouveau système productif, légal et culturel qui se développe de pair avec la montée en puissance de cette classe…… Loin d’être les simples serviteurs d’intérêts économiques particuliers ou des témoins passifs de l’histoire, les plus avancés parmi les intellectuels organiques sont voués pour Gramsci à être les véritables organisateurs de la société’’ (Introduction à Antonio Gramsci, pages 28 et 29).
(4) ‘’Surtout, il dit trouver chez Machiavel les sources de sa propre conception du politique comme « science autonome » et « art autonome » (Introduction à Antonio Gramsci, page 46).
(5) ‘’Nous avons donc, d’une part, un refus de la réduction du politique à l’économique (par l’admission de l’ « autonomie ») et, d’autre part, l’affirmation passionnée du caractère politique de toute la vie sociale. Ainsi, il n’est guère étonnant qu’on ait pu présenter Gramsci avant tout comme un « théoricien du politique » [Hall, 1987]’’ (Introduction à Antonio Gramsci, page 46).
(6) : ‘’Il s’agit de faire émerger du peuple (ou de certains secteurs de ce dernier) une « volonté collective » qui l’oriente vers la construction d’un « nouvel Etat », en déclenchant en son sein des dynamiques que Gramsci qualifie d’ « universelles ». Bien des débats ont eu lieu chez les héritiers de Gramsci pour définir la nature exacte de cette « volonté collective », et en particulier son rapport avec les classes sociales. La volonté collective est-elle l’expression dans l’ordre de la conscience d’une condition de classe qui préexiste ? Est-elle au contraire contingente, au point qu’elle pourrait regrouper des individus appartenant à des classes différentes ? Dans ce second cas, le concept de « volonté collective » pourrait avoir été un moyen pour Gramsci d’échapper à un déterminisme de classe excessif dans le marxisme de son temps’’ (Guerre de mouvement et guerre de position, page 160).
(7) ‘’ Pour Gramsci, les professeurs d’université, les journalistes, les écrivains sont bien sûr des intellectuels, mais aussi les artistes, les prêtres, les techniciens, les hommes politiques, les fonctionnaires, les avocats, voire les officiers d’armée….car tous, d’une façon ou d’une autre, remplissent une certaine fonction culturelle, politique ou technique, par-delà le processus immédiat de reproduction matérielle de la société. Tous vont participer au processus par lequel un certain climat culturel, une certaine « vision du monde » ou Weltanschauung » – mot allemand cher à Gramsci – sont créés, diffusés, reproduits dans le temps et l’espace’’ (Introduction à Antonio Gramsci, page 27).
(8) ‘’La société civile est définie comme englobant toutes les relations sociales et les organisations qui ne participent ni à la reproduction économique de la société (entreprises) ni à la vie de l’Etat. Il s’agit donc d’institutions « privées », parmi lesquelles il faut compter les organisations religieuses (dont l’Eglise catholique), les syndicats et les partis politiques, les établissements culturels (médias, maisons d’édition, etc… ) et généralement toute forme d’association libre de citoyens. Gramsci conçoit la société civile comme le terrain social où les rivalités et les luttes à caractère idéologique et culturel se jouent et se dénouent entre individus et groupes sociaux. On voit donc un rapprochement possible entre la société civile et la figure de l’intellectuel comme organisateur politique et « persuadeur permanent »’’ (Introduction à Antonio Gramsci, page 47).
(9) ‘’les intellectuels sont appelés à diffuser une nouvelle conception du monde, à produire une nouvelle culture et à assumer un rôle directeur dans le combat politique’’ (Introduction à Antonio Gramsci, page 32).
(10) ‘’A l’image de l’avant-garde des intellectuels organiques de la bourgeoisie au XIXe siècle, le « nouvel intellectuel »(communiste) au XXe siècle doit être l’organisateur politique de la classe à laquelle il s’identifie (le prolétariat)’’ (Introduction à Antonio Gramsci, page 32).
(11) ‘’Au contraire, l’intellectuel organique de Gramsci n’est défini ni par son niveau d’éducation ni certainement par son origine sociale, mais par sa fonction de dirigeant de la révolution et d’élite politique’’ (Introduction à Antonio Gramsci, page 33).
(12) ‘’La notion d’ « homogénéité », récurrente sous la plume de Gramsci, renvoie à ce moment décisif où un groupe social acquiert une conscience de soi et se prépare ainsi à entrer sur la scène de l’histoire en tant qu’acteur collectif’’ (Introduction à Antonio Gramsci, page 32).
(13) ‘’Ainsi, il note avec admiration comment l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert et, plus généralement, l’atmosphère « voltairienne » du siècle des Lumières ont préparé le terrain culturel pour la « Grande Révolution » de 1789’’ (Introduction à Antonio Gramsci, page 33).
(14) Tout ce travail n’a servi à rien puisque l’effondrement du bloc soviétique a entraîné dans sa chute tous les partis communistes d’Europe. De plus, le PCI aurait été confronté au problème de l’immigration auquel il aurait été incapable, tout comme LFI en France, de proposer une solution satisfaisante
Le vocabulaire de Gramsci
Bloc historique : ‘’Autrement dit, entre les structures et les superstructures se trouve un ensemble de médiations qui les conduisent à former un « bloc historique », et qui empêchent un effondrement de l’économie d’entraîner un effondrement correspondant du système politique. C’est seulement lorsque les crises deviennent « organiques », c’est-à-dire qu’elles se transforment en crises du bloc historique lui-même, qu’elles contaminent toutes les sphères sociales : économie, politique, culture, morale…Gramsci qualifie aussi ces crises de « crises d’hégémonie » ou de « crises de l’Etat dans son ensemble ». Est à l’œuvre ici la critique gramscienne du déterminisme ou « catastrophisme », très répandu dans le marxisme de son époque, et qui conduit à voir dans les crises économiques des causes directes des révolutions. Pour que les « tranchées » et « fortifications » cessent de faire office de remparts face aux crises, l’intervention d’une « volonté collective » est indispensable. Cette intervention se fait sur le « terrain de l’occasionnel », c’est-à-dire au moment où la crise fait vaciller l’Etat, mais elle inclut aussi la « guerre de position » préalable, qui peut d’ailleurs se poursuivre après la prise du pouvoir, et dont l’objectif est de saper les « tranchées » et « fortifications » qui protègent l’ordre social’’ (Guerre de mouvement et guerre de position ; page 164).
Crise : ‘’La crise consiste justement dans le fait que l’ancien meurt et que le nouveau ne peut pas naître ; pendant cet interrègne on observe les phénomènes morbides les plus variés’’ (Guerre de mouvement et guerre de position ; page 38).
Crise organique : ‘’Quand ce sont les fondements mêmes de l’ordre social qui tremblent, en revanche, Gramsci parle de « crise organique »…..Alors que Gramsci croit percevoir la décadence de la civilisation bourgeoise (l’ancien qui se meurt) et anticipe déjà une révolution du prolétariat (le neuf qui ne peut naître), il conçoit la crise organique comme stase prolongée des forces en présence, dont il note qu’elle peut durer des « dizaines d’années »’’(Introduction à Antonio Gramsci ; page 58).
Economisme : ‘’Il se montrera un pourfendeur particulièrement fervent du déterminisme économique, d’abord dès 1917 dans un bref article resté célèbre « La révolution contre Le Capital puis dans les Cahiers de prison où le terme « économisme » sert à désigner sa cible. Gramsci n’a pas de mots assez durs pour qualifier l’économisme, qui consiste à interpréter tout événement ou tendance politique comme reflet univoque de l’infrastructure économique ; à un moment, il parle même à son sujet d’ « infantilisme primitif » [Q7,§24] ‘’ (Introduction à Antonio Gramsci ; page 80)
Guerre de mouvement et guerre de position : ‘’Nous avons déjà vu que la guerre de position tend, non pas à renier, mais à relativiser l’idée de la révolution comme rupture ou « grand soir ». La conquête de l’Etat, autrement dit l’assaut sur la société politique bourgeoise – la guerre de mouvement – succède à une lutte hégémonique de longue haleine, à caractère idéologique et culturel, menée sur le terrain de la société civile. L’évènement de la révolution, plus qu’un cataclysme, est un aboutissement ; il ne justifie aucun messianisme. De plus, la théorie de l’hégémonie incite à penser au-delà du grand soir : dans les Cahiers de prison, Gramsci affirme que le projet hégémonique communiste devra se poursuivre après la conquête de l’Etat. Ainsi, il note qu’un groupe social « devient dominant lorsqu’il exerce le pouvoir, le tenant fermement dans son poing, mais il doit aussi maintenir sa fonction « dirigeante »’’ (Introduction à Antonio Gramsci, page 110)
Hégémonie : ‘’De manière spécifique, l’hégémonie sert à désigner l’ensemble des processus par lesquels s’engendre le consentement des masses humaines vis-à-vis du système des relations sociales. A ce titre, l’hégémonie est une construction à jamais inachevée, dont les ramifications s’étendent de l’existence journalière des individus aux sommets de l’Etat – et pourquoi pas des organisations internationales – en passant par toutes les institutions et associations de la vie économique et de la société civile’’ (IAG page 115). Le processus de conquête de l’hégémonie culturelle ne s’achève pas avec la conquête du pouvoir politique, c’est un combat interminable.
Homogénéité : ‘’La notion d’homogénéité, récurrente sous la plume de Gramsci, renvoie à ce moment décisif où un groupe social acquiert une conscience de soi et se prépare ainsi à entrer sur la scène de l’histoire en tant qu’acteur collectif’’ (IAG page 32) ; ‘’Alors la classe sociale, politiquement et culturellement homogénéisée, engendrera une volonté collective. Le Parti lui-même sera un « intellectuel collectif », selon l’expression de Palmiro Togliatti, le successeur de Gramsci à la tête du PCI’’ (IAG, page 63).
Idéologie : ‘’Gramsci écrit que l’idéologie est ainsi « une conception du monde qui se manifeste implicitement dans l’art, dans le droit, dans l’activité économique, dans toutes les manifestations de la vie individuelle et collective » [Q11, §12]…….Gramsci se réfère à plusieurs reprises dans les Cahiers à la façon dont les idées des philosophes des Lumières s’étaient diffusées, au fil du XVIIIe siècle, non seulement auprès de la bourgeoisie française, mais aussi – de façon réfractée, nécessairement simplifiée – au sein des classes populaires, réformant le sens commun, préparant discrètement la Grande Révolution’’ (Introduction à Antonio Gramsci ; page 77).
Intellectuel organique : voir les notes 3, 9 , 10 et 11 ci-dessus. ‘’Insister sur le rôle capital de ce travail d’organisation, conduit par les intellectuels organiques, est une façon pour Gramsci de rejeter l’interprétation mécaniste ou déterministe de l’histoire qui constitue pour lui le « marxisme vulgaire »’’ (IAG, page 63).
National-populaire : ‘’A un premier niveau, on retrouve l’impératif d’être « national-populaire », c’est-à-dire de sacrifier une partie des intérêts particuliers de sa propre classe pour universaliser son projet en se faisant le porte-drapeau de la lutte de tous les éléments populaires de la société. Cela revient à poser la question de l’alliance des classes dans la révolution’’ (IAG page 63). ‘’Le prolétariat peut devenir la classe dirigeante et dominante dans la mesure où il parviendra à créer un système d’alliances de classes qui lui permettra de mobiliser la majorité de la population laborieuse contre le capitalisme et contre l’Etat bourgeois’’ (Gramsci, Alcuni temi, 1926). ‘’Au mythe du grand soir doit donc se substituer le travail révolutionnaire du parti dans la société civile, sous la forme d’une lutte de longue haleine par la « persuasion permanente », en vue de la formation d’un bloc « national-populaire »’’ (IAG, page 68).
Sens commun : ‘’ Par son insistance réitérée sur le sens commun, Gramsci nous invite à prendre ses contenus tout aussi sérieusement que nous le ferions des productions des philosophes professionnels. Ces deux versants de la « philosophie », d’ailleurs, s’influencent mutuellement au cours de l’histoire, se façonnent l’un l’autre inconsciemment. Les savants développent leurs systèmes à partir de l’humus spirituel d’une époque et, par ailleurs, le sens commun se renouvelle en filtrant ces systèmes pour en incorporer quelques éléments’’ (IAG , page 71). ‘’Remarquons cependant que, chez Gramsci, aux côtés de l’ambition de prise de pouvoir prolétarienne, l’on trouve l’idée – peut-être tout aussi radicale – de refonte du sens commun. Encore une fois, il s’agit essentiellement de s’atteler au niveau le plus concret, le plus immédiat, pour y planter et y développer les germes d’une nouvelle Weltanschauung’’ ( IAG page 116).
Volonté collective : voir note (6) ci-dessus
Merci pour cette analyse passionnante et fine des mécanismes qui permettent de diffuser des idées pour qu’elles deviennent dominantes.
C’est important de connaitre ses classiques pour la cultur Gé et l’histoire MAIS Gransci est un peu vermoulu comme personnage …
L’époque, les moyens, les mentalités ont radicalement changé depuis.
C’est un fréquent écueil des intellectualistes d’aller chercher chez les intellectualistes du passé les réponses adaptées à un mode radicalement différent.
Gramsci n’était pas occupé par 18% d’Africains qui réfléchissent leur occupation que par le prisme de leurs intérêts communautaires et religieux, ça change absolument tout 20% d’occupants dans un pays.
Surtout quand l’occupant est incrusté dans administrations, les corps constitutions, les gouvernements, comme une immense armée de réserve qui vote Macron comme un seul homme !
(90% dans le cas de Macron, 95% dans le cas de Hollande, ce n’est pas une exagération que de dire que l’occupant fera tout pour préserver le système qui le gave, les muz en premiers de la liste !)
Tiens cela tombe bien puisque le prolétariat décrit par Gramsci c’est désormais un mot réservé aux occupants Africain …
Les occupants africains ont même spolié ce qualificatif de « prolo » aux smicards blancs et en ont fait des « mâles blancs privilégiés » car l’occupant est vorace et ne vous laissera rien !
Gramsci est un homme du passé et pas du meilleur des passé, car être encore un rouge à son époque tout en étant cultivé, il faut en tenir une sacrée couche.
Toujours remettre les auteurs dans les contextes historiques de leur époque, et l’époque du vieux Gramsci c’est l’époque de l’impérialisme communiste avec ses 22 colonies, ses camps de déportés goulag, son Holodomor etc…
Il n’y a aucune différence entre un communiste et un socialiste allemand (dit « nazi » pour cacher son socialisme), Gramsci était juste un cousin de Staline, Trotski et Hitler.
S’il ne l’avait pas été, vu ce qui se passait dès 1917 il aurait dit « ne me qualifiez plus jamais de communiste »
Ce n’est pas le cas, donc Gramsci est une mierda !
Ce gros taré de coco connaissait parfaitement bien la Russie il y a vécu.
On reconnait le bobo ultra-bourgeois de l’époque à ses voyages, URSS, Suisse France etc..
Un congés sabbatique permanent exactement comme Trotski et Staline et exactement comme toutes les rats prolétariens qui n’ont jamais bossé de leur vie et sont quasi tous issus de familles ultra-supra bourgeoises comme Marx etc…
(Gramsci était dans ce cas, à cette époque combien de sans-dents pouvaient passer leur vie à gribouiller et se promener aux 4 coins du monde ? Les 1% de privilégiés, les autres bossaient !)
C’est marrant d’étudier les bobos communistes, TOUS sont issus de milieux ultra-bourgeois et n’ont jamais eu de soucis matériels ni même alimentaires, mis à part peut-être Staline.
Tous ont passé leur vie à traîner les bars et les diners mondains d’un pays à l’autre !
Tous sont aussi prolétariens que le millionaire Mélenchon !
La crédibilité de ces rats prolétariens et on ne peut plus risibles.
C’est ça le souci de ne pas tous les étudier sur le plan personnel, pourtant nous avons accès à toutes les informations à disponibilité de clic ou de pages.
Combien ont lu entièrement ne serait-ce que la page Wiki de Trotski ? Quasi personne !
Est-ce qu’un clochard SDF depuis 50 ans pourrait se présenter comme patron du MEDEF crédible ?
Non, alors pourquoi les ultra-bourgeois cocos peuvent se présenter pour « révolutionnaires prolos » crédibles ?
Deux questions qui méritent d’être posées n’est-ce pas !
Ces gens sont à peine capables de nouer leurs lacets seuls, alors en faire des chefs de guerre révolutionnaires éclairés c’est comme faire d’un aveugle un chef des compteurs sémaphore !
Étudies la vie personnel de ces rats, on en reparle après tellement c’est risible.